Filage des métaphores du texte et du livre
Le séminaire EXTRA—TEXTE conduit un ensemble de recherches théoriques, graphiques et plastiques qui analysent et pensent la mise en espace du texte, c’est-à-dire la mise en forme du texte lui-même, qui donne sens et texture à l’ouvrage et ce qui, en entourant le texte, enrichit le contenu et oriente les lecteurs. À partir d'une étude du concept élargi de paratexte (Genette), le séminaire questionne ainsi les processus de (re)formulation éditoriale d’une œuvre et comment ceux-ci impliquent des processus créatifs de traduction particulièrement féconds. Toutes les formes de publications, de l’imprimée au numérique en passant par l’exposition/de la revue à la monographie en passant par les catalogues, ont une place dans ces recherches.
En 2020 était prévu une journée d’étude à l’École Supérieure d’Art de Lorraine pensée et organisée par les étudiant·es de 4e et 5e année sous le signe des « métaphores du livre et du texte » en compagnie d’intervenants enthousiasmants : Claire Morel, artiste; Clémence Michon, designer éditorial; Olivier Deloignon, historien du livre; Benoît Casas, écrivain et éditeur; Jérôme Dupeyrat, critique et théoricien du livre d’artiste, Quentin Juhel, graphiste-codeur et enfin Manon Remy, étudiante de l’ÉSAD d’Amiens aux préoccupations proches des nôtres. On sait bien ce qui remit en cause le projet : l’arrivée en France du covid 19. Les étudiant·es ont trouvé une alternative par le biais d'entretiens individuels. Ils ont préparé des questionnaires écrits, des interviews et ont échafaudé une plateforme numérique, véritable laboratoire de recherche réunissant artistes, graphistes, historiens du livre et écrivains autour d’une problématique commune, les usages artistiques et graphiques du « paratexte ».
Le paratexte, tel que défini par Gérard Genette dans Seuils, est l’ensemble des éléments(titre, nom d’auteur, préfaces, épigraphes, notes de bas de page, etc.) « par quoi un texte se fait livre et se propose comme tel à ses lecteurs, et plus généralement au public ». Si l’étude du paratexte convoque la sémiologie et la sociologie du livre, sa description révèle la permanence des modèles poétiques traditionnels, entre notamment, métaphores architecturales du livre et métaphores textiles du texte : Genette parle ainsi tour à tour de « seuils » et de « franges ». La modernité a transformé ces modèles. On peut dire que l’art des années 1960-1970, avec son intérêt pour les formes administratives et les logiques médiatiques, relève en partie d’un tropisme « paratextuel », postlittéraire. Depuis, la révolution numérique a multiplié les dispositifs de publication, et avec eux les zones hors-texte et hors-livre.
Le séminaire Extra—Texte trouve là des objets et des problèmes stimulants à la fois la réflexion critique et l’expérimentation plastique. L’utopie du livre peut être vécu, mais le regard peut encore se porter sur les marges mouvantes, les « hétérotopies ». Nous pensons qu’une idée hétérotopique du livre, une idée du livre comme « contre-espace », se loge dans les contre-espaces du livre.
La Plateforme EXTRA—TEXTE a bénéficié du soutien financier de la Grande Région.